ODILE KENNEL / .... souvenir de confinement, il y a un an, il y a un siècle...

Odile Kennel

 a partagé un souvenir.

  · 

souvenir de confinement, il y a un an, il y a un siècle...

Il y a un an

Affichez vos souvenirs

Odile Kennel

  · 

Une des dernières méduses alto-atmosphériques jadis importées de Jazaranda, génétiquement modifiée, ayant subi diverses mutations plus ou moins spontanées, hante la petite ville dortoir, planant très bas au dessus des maisons. Durant les longues nuits d’hiver, elle traîne les haillons de sa coiffe blanchie sous la lune et lâche sur les toits ses œufs infertiles qui dribblent, criblent le toit des greniers. Ici le sommeil est obligatoire, les rêves imposés. Cependant, les pauvres servantes, les infantes punies, les vieillardes oubliées et les épouses rebelles confinées qui grelottent sans pouvoir fermer l’œil dans les soupentes pleines de courants d’air entendent les ovules secs frapper les tuiles comme une grêle opiniâtre. Elles se sorciérisent, à la longue. Inventant les grimoires anciens sous les lames du parquet poussiéreux, les momies desséchées au fond de malles-cabines, les poupées désarticulées sans yeux à demi scalpées dans les petits meubles à secret, parmi les lettres d’amour nouées par un ruban satiné que le temps décolore et les pages laborieusement calligraphiées à la plume sergent-major, elles retrouvent tout le savoir du monde. Et, nul ne l’ignore, là résidera bientôt leur puissance. Mais elles ne le savent pas encore. D’abord, redécouvrir les clefs.