ODILE KENNEL : ROUGE ETOFFE, bleu HORIZON, BLANCS OSSEMENTS
Après lecture de l'excellent "Gnadentot" de Philippe Claudel (in Fantaisie Allemande, chez Stock), me revient ce que la mort de Franz Marc lue dans une de ses biographies m'avait inspiré... texte et image :
" La poupée humaine courait sur ses jambes brisées. Par les accrocs de ses vêtements déchirés, s’échappaient des brins de chanvre et des esquilles de bois ; les tiges métalliques saillaient sous l’étoffe rouge du pantalon, rouillaient très vite et se décomposaient. Sa veste de drap bleu horizon n’était plus que guenilles. Les boutons dorés avaient disparu un à un, laissant des trous effilochés sur la poitrine.
Au bout d’un temps interminable, elle se rendit compte qu’elle gisait dans la terre, jetée au travers d’un cratère : elle n’avait fait qu’imaginer sa fuite. Des larmes perlèrent à ses beaux yeux peints qui regardaient au loin, au point de croisement des tranchées.
Là se tenait un cavalier immobile, à découvert, qui attendait.
Il y eut un souffle, il y eut un dernier jour, un dernier matin. Une pluie de fer de feu d’acier de sang. Cheval poupée sentinelle se dépouillèrent.
Se décharnèrent.
Leurs ossements blancs restèrent suspendus dans l’air brûlant l’espace d’un instant, avant de retomber en poussière définitive."