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Union des Ecrivains Vosgiens
11 juin 2021

"L'arbitre des élégances " Vie d'autrefois par Marie Houillon

L'Association "Ralentir pour Vivre" 88240 Les Voivres

en collaboration avec le Blog Les Voivres 88240

vous présente ce vendredi

"L'arbitre des élégances " 

Marie Houillon 

En vous souhaitant bonne lecture

À mardi

Marie Houillon 2

 

Au début de ce siècle, vers les années 1900, il y avait aux Voivres de grandes familles, sept, huit, dix enfants. Quand ces jeunes atteignaient treize à seize ans, si la ferme ne pouvait nourrir tout le monde, il fallait bien chercher du travail ailleurs. Pour certains, c'était l'usine Dorget, à La Forge de Thunimont (tissage et filature de coton). Mais, pour la plupart des jeunes filles, le travail courant était le placement " en condition " comme on disait, dans une famille aisée de la ville la plus proche. Là, ces demoiselles cumulaient les rôles de bonne d'enfants, bonne à tout faire, cuisinière à l'occasion, femme de chambre souvent. Elles avaient des journées bien remplies, très peu de loisirs et un salaire modeste.
Cependant, compte tenu qu'elles vivaient en ville, qu'elles promenaient les enfants du patron au Parc le dimanche, y rencontrant les militaires de la caserne voisine qui venaient tuer le temps en écoutant la musique au kiosque, ces jeunes filles se considéraient comme beaucoup plus évoluées que leurs compagnes restées au village. Sur leurs quelques sous, elles prélevaient de quoi s'acheter des vêtements, des colifichets à la mode, souvent de peu de valeur, mais est-il besoin de s'habiller cher quand on est jeune, bien faite ... et française ?

Quand elles revenaient au village pour quelques jours de congés, elles prenaient un malin plaisir à épater, par leur élégance, les indigènes du terroir.

La grande mode, pendant une saison, fut celle des jupes à franges, balayant gracieusement les pieds finement chaussés.
Le Flavien, lui posait un regard critique sur ces élégantes, qu'il n'était pas loin de traiter de dévergondées ! Il n'aurait pas fait beau voir que sa femme, la Pauline, se pare d'une jupe à franges.

Cependant, bien que réprobateur, il tolérait ces fantaisies chez les demoiselles de la ville.

Mais voilà qu'à la saison suivante, les franges avaient disparues, remplacées qu’elles étaient par des pompons ! Eh oui ! Des pompons en guirlande, pas plus gros que des cerises, qui battaient les chevilles des élégantes et balayaient le sol derrière elles !

Alors là, le Flavien n'était plus d'accord, mais plus du tout ! Suffoquant d'indignation, il prenait sa femme à témoin :

" Ah ! Vô djé co, mé pôr Poline ! Dâ franges, cé péssé co, mâ dâ pompons, c'n'o pus c'lé ! "

( Ah ! Vous aurait beau dire, ma pauvre Pauline. Des franges, cela passait encore, mais des pompons, ce n'est plus cela ! )

Il faut croire que le Flavien exprimait là un avis général, car la mode des pompons au bas des jupes ne fit pas long feu et l'on revint à des tenues plus raisonnables !

Mais ces demoiselles avaient fait leur petit effet, et elles étaient ravies, au fond, d'avoir provoqué l'indignation du Flavien !

 

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